Article mis à jour le 26 janvier 2024

Crimes et châtiment (suite)

Charlene trouva de nouveau un emploi dans le commerce de la viande, cette fois-ci comme responsable de vente, ce qui l’amenait à voyager au Nevada, sur la I-80. Charlene se voyait déjà, tout comme son père, directrice de toute une filiale, d’ici à quelques années.
Gallego trouva un nouvel emploi de chauffeur de poids lourds et voyagea du côté de San Francisco. Il avait retrouvé un emploi… et son impuissance disparut. Il redevint l’amant insatiable que Charlene avait connu au début de leur relation. Il ne garda son emploi que trois mois, mais en trouva un autre, dès décembre, comme barman.
Il eut une aventure avec une autre femme (blonde aux yeux bleus, comme toujours) et Charlene fut heureuse de ne plus avoir à satisfaire ses demandes sexuelles. Mais, en peu de temps, la nouveauté de sa conquête se dissipa et Gallego recommença à chercher des sources d’excitation.
Charlene eut du mal à le comprendre. Pour la première fois, il avait un emploi, une maîtresse, une femme, il n’était plus impuissant, mais il voulait quand même ses “esclaves”.

Le Sunrise Mall
Le Sunrise Mall

Le 24 avril 1980, Gerald et Charlene Gallego épièrent la foule d’adolescentes sur le parking de “Tower Records”, au Country Club Plaza de Sacramento, où ils avaient déjà enlevé Rhonda Scheffer et Kippi Vaught un an et demi plus tôt. Voyant trop de policiers à leur goût, ils partirent et se rendirent au Sunrise Mall, à Citrus Heights, à 20 minutes de Sacramento. Ils avaient eu de la chance dans un centre commercial avec leurs premières victimes, pensèrent-ils, alors pourquoi ne pas réessayer ?
Stacy Ann Redican et Karen Twiggs, 17 ans toutes les deux, étaient des filles intelligentes, mais pas assez méfiantes pour réaliser que l’offre de Charlene (un joint et une ballade dans un van) était un traquenard. Même lorsque Gerald pointa un 357 magnum sur elle et ordonna à Charlene de conduire, elles semblèrent plus curieuses qu’apeurées, comme si elles pensaient que la situation était une sorte de jeu d’adulte auxquelles elles devaient simplement se livrer. Gallego discuta gentiment avec elle, leur posa des questions. Il apprit ainsi que la blonde, Stacy Ann Redican, rendez visite à la brune, Karen Twiggs, que Stacy avait fugué, mais que ses parents habitaient le Nevada et ne s’inquiéteraient pas de sa disparition avant un bon moment.

Gallego avait délibérément questionné les filles afin d’obtenir toutes les informations qu’il voulait : il savait qu’on ne se mettrait pas à leur recherche avant longtemps.
Il mit la radio en marche (il adorait la country et se prenait pour un cowboy) et conduisit sur la I-80. Ils parvinrent finalement au Limerick Canyon, près de Lovelock. Charlene sortit du van tandis que Gallego passait à l’arrière et violait les adolescentes à plusieurs reprises. Puis, il sortit du van avec sa pelle pour aller creuser leurs tombes, et ordonna à Charlene de les surveiller. Là encore, elle ne tenta pas de libérer les adolescentes ni de leur venir en aide.
Lorsqu’il revint, Gallego demanda à Charlene si elle “voulait” les filles. Charlene Gallego, surprise, ne comprit pas où il voulait en venir. Gallego ajouta : « Je me sens mal parce que toi, tu ne profites jamais de ces choses-là ». Charlene refusa. Du moins, c’est ce qu’elle allait affirmer par la suite.
Comme il l’avait fait auparavant, Gallego sortit Stacy Ann et Karen du van une par une et les tua avec son marteau, puis les enterra. Cette fois, pourtant, Charlene ne le laissa pas garder son arme. Elle jeta le marteau par la fenêtre lorsqu’ils repartirent vers Sacramento.

Ils roulèrent ensuite vers Winnemucca parce que Charlene devait y rencontrer un client. Gallego, tout en conduisant, demanda à Charlene de vider le contenu des sacs des deux adolescentes dans le van. Il ne garda qu’un ou deux objets en souvenir et jeta tout le reste dans une poubelle. Ils passèrent la nuit près de Winnemucca, où Charlene nettoya le van sous les ordres de Gerald. Le lendemain, elle se rendit tranquillement à son rendez-vous d’affaires, puis acheta des vêtements neufs pour “son homme” car ceux qu’il portait la veille étaient tachés de sang.
Ils revinrent ensuite à Sacramento et, voyant que l’on ne parlait pas de la disparition des filles dans les journaux, ils reprirent leurs vies comme si de rien n’était.

Les corps furent découverts quelques jours plus tard par un groupe de pique-niqueurs et leur chien. Ils avaient été à moitié déterrés par les coyotes. La mère de Stacy Ann Redican identifia sa fille et les radios dentaires de Karen Twiggs permirent rapidement de l’identifier à son tour. Le shérif du compté contacta un agent du FBI, qui enquêta au Nevada, à Sacramento, et à Citrus Heights, au Sunrise Mall. Malheureusement, il ne trouva rien de probant.

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Charlene, qui avait avorté l’année précédente, réalisa qu’elle était de nouveau enceinte. Elle s’attendit à ce que Gallego réagisse mal et fut très surprise lorsqu’il parut plutôt heureux. L’idée de créer la vie nourrit son énorme ego et, surtout, une vie de famille lui fournirait une “couverture” parfaite pour ses crimes.
Il alla même jusqu’à épouser Charlene de nouveau, le 1er juin, cette fois en utilisant son pseudonyme de Stephen Robert Feil. Pensant que ce nouveau mariage l’aiderait à cimenter sa nouvelle identité et à dissimuler un peu plus la véritable, Gerald Gallego se détendit. Et commença à prendre des risques.

Les Gallego/Feil décidèrent de passer une seconde lune de miel dans l’Oregon. C’est là qu’ils remarquèrent leur prochaine victime.

C’était le 7 juin 1980 et Linda Aguilar n’était pas le genre de femme que Gerald appréciait normalement (elle avait 21 ans, des cheveux noirs et elle était enceinte). Mais lorsqu’il l’a vu marcher le long de l’autoroute, Gallego décida qu’il devait «l’avoir». Il ralentit le van et demanda à Linda si elle voulait qu’ils la prennent en stop. Linda, qui portait un lourd sac de courses, accepta. Charlene tenta bien de convaincre “Gerry” de ne pas la toucher : elle était enceinte, comme elle. Mais “Gerry” lui ordonna de conduire et, son 357 magnum à la main, il attacha Linda.
Ils finirent par s’arrêter, et Charlene attendit dans les bois jusqu’à ce que « Gerry soit prêt à partir ». En ressortant du van, il lâcha « Elle n’a rien pu faire pour moi », désabusé et moqueur. Charlene remonta dans le van et Gallego conduisit à travers les montagnes et le désert, jusqu’à ce qu’il trouve un endroit qui lui plaise. Gallego fit sortir Linda Aguilar pour l’emmener plus loin. Il la frappa avec une pierre et l’étrangla.
Ils jetèrent son sac dans une décharge, le long de l’autoroute.
Ce soir-là, Gerald Gallego demanda pardon à Charlene. Il était désolé… d’avoir gâché leurs vacances. Uniquement d’avoir gâché leurs vacances.

Les autorités pensèrent d’abord que Linda Aguilar, qui était connue comme quelqu’un de “libéré”, était tout simplement partie ailleurs. Mais alors que les jours s’écoulaient, la suspicion augmenta et lorsque le corps de la jeune femme fut découvert le 22 juin 1980, la police suspecta son petit ami de l’avoir tuée.
Même après qu’un témoin a reporté avoir vu une femme enceinte brune monter dans un van clair, le jour où Linda avait disparu, les preuves indirectes et les rumeurs contre le petit ami eurent plus de poids dans l’esprit des policiers. Il avait battu Linda auparavant, il y avait du sang et une hachette chez eux, et les enquêteurs étaient prêts à l’inculper de meurtre. Le médecin légiste découvrit que, malgré les coups portés à la tête, Linda était encore vivante lorsqu’elle avait été enterrée. Ce détail horrible révolta la population de la petite communauté de Wedderburn au point qu’elle voulut s’en prendre physiquement au suspect.

La relation de Gerald et Charlene Gallego se détériorait. Ils fumaient souvent des joints, buvaient de plus en plus et Charlene prenait même de la cocaïne. Gallego s’était pris de passion pour la pêche et tenait à ce qu’elle vienne avec lui. Elle qui n’avait jamais pêché auparavant attrapait tous les poissons alors que Gerald n’en trouvait aucun, ce qui le rendait fou.

Il n’attendit qu’un mois et demi avant de frapper à nouveau. Charlene (qui était toujours enceinte) et lui passèrent le 16 juillet 1980 à boire. Charlene finit par sortir pour vomir. Gerald la rejoignit et elle crut qu’il allait s’énerver, comme toujours lorsqu’elle était malade. Au contraire, il se mit à pleurer. Complètement saoul, il lui expliqua son “aventure” avec « l’autre femme », lui assura qu’il n’était pas assez bon pour elle et lui demanda de le pardonner. Charlene lui assura qu’elle ne lui en voulait pas. Il se calma et décida « d’aller faire un tour ».

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Ils passèrent donc leur soirée à boire encore plus au Sail Inn, un bar de West Sacramento. Gerald sembla ne porter aucune attention à Virginia Mochel, la barmaid, une femme blonde et mince (qui faisait plus jeune que son âge), avec laquelle Charlene discuta un long moment. Lorsque le bar ferma, toutefois, Gallego dit à Charlene qu’il ne voulait pas partir. Il demanda à Virginia si elle ne voulait pas venir fumer un joint avec eux, mais elle refusa. Charlene poussa son époux dehors. Elle avait compris ce qu’il cherchait à faire et lui indiqua que la police aurait un lien direct avec eux, puisque tout le monde les avait vus avec la barmaid.

Mais Gallego attendit la fermeture du bar, dans le parking, malgré les protestations de Charlene. Lorsque Virginia Mochel sortit du bar après avoir tout fermé, Gerald la força à entrer dans le van en la menaçant avec son 357 Magnum. Mais cette fois, au lieu de conduire le van dans les bois ou le désert, il le ramena chez eux. Sur la route, Virginia Mochel demanda à Gallego de la relâcher, parlant sans cesse de ses enfants qui allaient être seuls à la maison. Mais Gallego ne l’écouta pas.
Ils parvinrent enfin chez eux et Charlene sortit du van, furieuse. Elle attendit à l’intérieur, en regardant la télévision, hésitant entre la colère et la peur. Lorsqu’il eut obtenu ce qu’il voulait, Gerald vint chercher Charlene et lui dit de monter dans le van. Elle conduisit, suivant ses instructions, alors qu’il étranglait Virginia. Puis, il expliqua qu’il fallait qu’ils trouvent « un endroit pour se débarrasser d’elle ». Ils jetèrent le corps en dehors de Clarksburg, près d’un endroit où ils étaient déjà venus pêcher. Charlene dut ensuite nettoyer le van, comme d’habitude, et Gallego jeta le sac et les bijoux de Virginia.

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Le lendemain, Gerald Gallego célébra son 34ème anniversaire avec une jubilation obscène.
Virginia Mochel avait le même âge que lui. Elle avait également deux jeunes enfants qu’elle adorait et n’était pas du genre à s’en aller sans rien dire. Aussi la police prit-elle sa disparition au sérieux. Les patrons du Sail Inn expliquèrent qu’un couple, un Stephen et une Charlene, avaient passé la soirée au bar cette nuit-là et l’avaient quitté en dernier. “Stephen” était saoul, il avait importuné Virginia par des remarques grossières et elle l’avait rabroué plus d’une fois. Le collègue de Virginia, le barman, se souvint même de ce que ce “Stephen” lui avait dit : son nom de famille était “Feil” et il travaillait lui aussi dans un bar, au nord de Sacramento.
La police retrouva “Stephen Feil” à son nouvel emploi de barman et il admit qu’il avait été au Sail Inn la nuit précédente. Mais il ne savait rien de Virginia Mochel ni de ce qui lui était arrivé. Charlene donna une réponse similaire et dit à la police que son époux et elle avaient passé la journée à pêcher avant d’aller au bar. Ils avaient beaucoup bu et elle ne se souvenait pas de grand-chose…

Gerald et Charlene ne s’entendaient vraiment plus. Gallego, qui n’avait jamais hésité à frapper Charlene, devint de plus en plus violent.
En septembre, Charlene le quitta et retourna vivre chez ses parents. Gallego s’éloigna un moment de Sacramento pour s’installer avec une ex-petite amie.

Le 2 octobre 1980, le corps de Virginia fut découvert dans un coin de pêcheurs. Ses mains étaient attachées avec du fil de pêche, ce qui donna matière à soupçonner “Monsieur et Madame Feil”. Les enquêteurs demandèrent à Charlene de passer au commissariat pour répondre à quelques questions.
Elle sembla coopérative et intelligente, et répondit du mieux qu’elle le put. Elle assura avoir été trop saoule pour se souvenir des détails. Lorsque le policier qui l’interrogeait lui demanda comment elle avait fait pour rentrer chez elle dans cet état, Charlene Gallego répondit en souriant : « Par la grâce de Dieu». L’enquête resta au point mort.

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L’Arden Fair

Au mois de novembre, Gallego revint à Sacramento et Charlene accepta de le revoir. Le 1er novembre, ils empruntèrent l’Oldsmobile de Charles et Mercedes Williams, expliquant qu’ils allaient au restaurant, puis au cinéma.

Gerald et Charlene se saoulèrent à nouveau cette nuit, et il fallut peu de temps avant que Gerald annonce son intention de capturer des “esclaves”. Charlene conduisit alors qu’il observait la foule de plusieurs centres commerciaux. Cela prit du temps et Charlene, réalisant que le jeu devenait dangereux, voulut abandonner et repartir chez ses parents. Mais vers 1h du matin, Gallego lui ordonna d’arrêter la voiture à Arden Fair, un centre commercial populaire. Elle fut choquée lorsqu’elle comprit qu’il ne voulait pas enlever deux filles, cette fois, mais un homme et une femme, des étudiants.

Charlene gara l’Oldsmobile sur le parking et Gerald sortit, approchant Craig Miller et Mary Elizabeth Sowers (qui devaient se marier en décembre), un calibre .25 à la main. Espérant que leur consentement empêcherait leur agresseur saoul de le faire du mal, le couple le suivit sans broncher et monta dans le véhicule. Ils ne crièrent pas lorsqu’un ami de Craig, avec qui ils avaient passé la soirée, se pencha sur la voiture et demanda où ils allaient. Mais Charlene l’insulta et lui ordonna de s’en aller. À la fois vexé et surpris, l’ami s’éloigna, non sans avoir noté le numéro de la plaque minéralogique de l’Oldsmobile alors qu’elle s’éloignait.

Charlene conduisit jusqu’au Comté d’El Dorado, tentant de faire comprendre à Gerald à quel point ce qu’ils faisaient était dangereux, et que l’ami du couple avait sans doute vu son arme et la plaque minéralogique de la voiture et… Gallego ne voulut rien savoir. Lorsqu’ils parvinrent à Bass Lake Road, il lui ordonna de s’arrêter. Il imposa à Craig de sortir de la voiture, le fit avancer devant lui et lui tira trois balles dans la tête. Ensuite, il remonta en voiture et dit à Charlene de les conduire à son appartement.
Lorsqu’ils y parvinrent, il emmena Mary Beth dans sa chambre. Charlene regarda la télévision et finit par s’endormir pendant que Gallego violait la jeune étudiante !
Enfin, elle les conduisit de nouveau dans les bois, près de Sierra College, à 30 km à l’est de Sacramento. Gallego fit avancer Mary Beth devant lui, puis lui tira trois balles dans la tête. Charlene et lui revinrent ensuite à son appartement pour faire disparaître les preuves.

Mary Elizabeth et Craig Miller
Mary Elizabeth Sowers et Craig Miller

Le lendemain, ils jetèrent le sac de Mary Beth Sowers et le calibre .25 dans la Sacramento River. Puis, ils décidèrent d’aller chez les parents de Charlene pour laver les draps de Gallego et faire disparaître les preuves. Mais lorsqu’ils parvinrent chez Charles et Mercedes Williams, la police était là.
L’ami de Craig Miller avait bien noté le numéro de l’Oldsmobile et avait prévenu la police. Craig ne s’était pas présenté au travail et Mary Beth n’était pas rentré alors que sa voiture était toujours garée au centre commercial. Les policiers avaient décidé de commencer immédiatement leur enquête.

Gerald Gallego, avec son courage habituel, s’enfuit, laissant Charlene se débrouiller seule avec les questions des enquêteurs. Charlene expliqua que son mari et elle étaient allés au cinéma dans sa voiture rouge, une Triumph, puis avaient dormi chez lui. L’Oldsmobile de ses parents n’avait soi-disant pas bougé. Les policiers demandèrent à voir le véhicule et furent surpris par sa propreté. L’Oldsmobile avait visiblement été nettoyée, à l’extérieur comme à l’intérieur, très récemment. La couleur de la carrosserie et des sièges, la plaque, tout correspondait à la description de l’ami de Craig Miller.
Les policiers voulurent continuer à interroger Charlene, mais celle-ci, qui était enceinte de 7 mois, leur expliqua qu’elle se sentait mal et devait se reposer. Les enquêteurs finirent par s’en aller, gardant leurs soupçons à l’esprit.
L’un des policiers nota le numéro de la plaque de la Triumph rouge du “mari” de Charlene et découvrit qu’elle appartenait à un “Stephen Feil”. Il imprima la photo de son permis de conduire et la présenta à l’ami de Craig Miller, qui reconnut l’homme qu’il avait vu dans l’Oldsmobile avec Craig et Mary Beth.

Gallego décida que le corps de Craig Miller, qu’il n’avait même pas tenté de cacher, devait être dissimulé avant que la police ne le trouve. Il ne savait pas que le cadavre avait déjà été découvert, le matin même, par un père et son fils en promenade. Lorsque Charlene et lui revinrent sur les lieux du meurtre en fin d’après-midi, ils ne trouvèrent rien. Gallego pensa qu’ils s’étaient trompés d’endroit, mais Charlene comprit rapidement que le corps avait tout simplement été découvert. Il lui reprocha pourtant d’être « trop bête pour retrouver le bon endroit » et ils tournèrent en rond durant des heures.
Lorsque Gerald Gallego finit enfin par comprendre, il demanda à Charlene de le ramener chez lui afin qu’ils se débarrassent de ses armes et de ses balles. Mais lorsqu’ils parvinrent dans sa rue, plusieurs voitures de police étaient garées devant l’appartement.
Ils décidèrent qu’ils devaient fuir. Ils parvinrent à convaincre les parents de Charlene que la police se trompait à nouveau et que les enquêteurs cherchaient juste un “bouc émissaire”. Ils conduisirent jusqu’à Reno où ils abandonnèrent l’Oldsmobile et montèrent dans un bus pour Salt Lake City (Utah).

À Sacramento, les preuves s’accumulaient et la chance dont avait bénéficié Gallego jusque-là le quittait. Craig Miller était le fils du directeur de l’une des sociétés de communication les plus puissantes du pays et Mary Beth Sowers était la fille d’un physicien nucléaire célèbre. Les meurtres des deux jeunes gens firent immédiatement les gros titres dans les journaux et les télévisons de tout l’ouest des États-Unis. Le père de Charlene ne voulait pas croire que son beau-fils puisse être un assassin, mais le doute le taraudait. Craignant que sa “fille chérie” ne devienne la prochaine victime, il contacta la police pour révéler aux enquêteurs que le véritable nom de “Stephen Feil” était Gerald Gallego et qu’il était recherché pour des viols sur sa propre fille.
Les policiers jetèrent un œil sur le long casier judiciaire de Gallego, qui avait été inculpé plusieurs fois pour viols et agressions sexuelles.
Ils prévinrent immédiatement le FBI, qui partit sur les traces des Gallego.

Charlene appela ses parents depuis Salt Lake City pour leur demander de l’argent, qu’ils envoyèrent. Gerald était presque excité par la situation, il avait l’impression d’être un cow-boy solitaire, un hors-la-loi du grand ouest…
Ils allèrent ensuite à Denver (dans le Colorado), où ils parvinrent à obtenir de faux papiers d’identité. Gerald Gallego était persuadé qu’il allait s’en sortir, comme d’habitude.

À Sacramento, une femme appela la police. Elle avait vu Gallego tirer quelques balles dans le grenier du bar où il travaillait, au nord de Sacramento. Il voulait jouer les machos et avait pensé l’impressionner. La femme conduisit les policiers jusqu’au grenier et ils récupérèrent les balles.
Peu après, la balistique établit que ces balles avaient été tirées avec la même arme que celle utilisée pour tuer Craig Miller.

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Gerald et Charlene Gallego partirent ensuite pour Omaha (dans le Nebraska), où Charlene appela de nouveau ses parents. À contrecœur, ils acceptèrent de lui envoyer plus d’argent.
Mais cette fois, ils informèrent le FBI de l’endroit où se trouvait leur fille. Le 17 novembre 1980, des agents attendirent à la banque Western Union d’Omaha et arrêtèrent le couple sans difficulté.

Quatre jours plus tard, deux jeunes promeneurs découvrirent le corps de Mary Beth Sowers. La balistique dévoila un peu plus tard que les balles trouvées dans son corps étaient les mêmes que celles qui avaient tuées Craig Miller.
Les enquêteurs localisèrent le van que les Gallego avaient revendu lors de sa séparation avec Charlene, trois mois auparavant. Les nouveaux propriétaires leur donnèrent une taie d’oreiller ensanglantée qu’ils avaient découverte à l’arrière du van ! Les policiers prélevèrent également des morceaux de moquettes du van et envoyèrent le tout au labo d’état de Californie.

Le Comté de Sacramento inculpa Gerald et Charlene Gallego des meurtres de Craig Miller et Mary Beth Sowers… en attendant plus.

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Défendue par un excellent avocat (payé par ses parents), Charlene choisit de passer un marché avec l’accusation. Le 27 juillet 1981, elle contacta le procureur, espérant que sa coopération dans l’affaire Craig Miller / Mary Beth Sowers lui permettrait d’être libérée. Elle expliqua que “Gerry” l’avait déposée à son appartement, était parti avec les deux étudiants, puis était revenu seul, avec du sang sur sa chemise. Le procureur ne la crut pas.

Charlene était persuadée que Gerald Gallego, tel un “chevalier blanc”, allait s’accuser de tout et affirmer que Charlene n’était responsable de rien. Mais “Gerry” n’en fit rien, au contraire. Charlene se sentit trahie et décida de l’accuser ouvertement. Elle expliqua à son avocat que Gerald et elle avaient déjà tué auparavant. À huit reprises.
L’avocat fut abasourdi. Il demanda à un détective privé de vérifier les dires de Charlene. Tout était vrai. L’avocat de Charlene décida à son tour de passer un marché avec les différents procureurs. Si elle donnait toutes les informations et preuves nécessaires pour faire accuser Gallego (ce que les différentes polices ne possédaient pas), la Justice lui assurerait la peine minimum.

Cela prit du temps, mais finalement, le procureur accepta qu’elle plaide coupable pour les meurtres de Karen Twiggs et Stacy Redican. Avec un mémoire incroyable, Charlene Gallego indiqua alors les endroits précis où les jeunes filles avaient été enlevées, conduisit les enquêteurs là où les corps des différentes victimes avaient été abandonnés ou enterrés (sauf ceux de Sandra Colley et Brenda Judd, qui avaient disparu dans un torrent de boue durant l’hiver), et décrivit en détail tout ce qui s’était passé.
En échange de son témoignage contre Gerald Gallego, elle ne fut pas libérée, mais condamnée uniquement à 16 ans de prison (la peine minimum qu’elle pouvait espérer en Californie pour un meurtre au second degré) pour les meurtres de Karen Twiggs et Stacy Redican.

Pensant qu’ils n’avaient pas assez de preuves physiques pour établir des circonstances aggravantes (et donc requérir la peine de mort), le procureur de l’Oregon décida de laisser la Californie et le Nevada endurer le coût des enquêtes et des procès, et n’inculpa pas le couple de quoi que ce soit ! Tant pis pour la famille de Linda Aguilar qui aurait voulu que Justice soit faite. Et pour le petit ami “coupable idéal” qui ne fut jamais totalement innocenté.