Article mis à jour le 26 août 2023

Crimes et châtiment

Mais, le dimanche 7 mai 1972, Kemper se décida à passer à l’acte.

santa cruz

Mary Ann Pesce, une jolie brune de 18 ans, et Anita Luchese, une blonde timide du même âge, étaient étudiantes à l’Université de Fresno. Elles faisaient de l’auto-stop pour rejoindre l’Université de Stanford après avoir passé quelques jours à Berkeley, près de San Francisco.
En les questionnant, Kemper comprit rapidement qu’elles ne connaissaient pas la région et, au lieu de se diriger au sud, vers Stanford, il conduisit vers l’intérieur des terres, à l’est. Arrivé près d’une forêt, il sortit soudainement son pistolet de sous son siège et le pointa sur les deux étudiantes. Anita se recroquevilla sur son siège, mais Mary Ann resta confiante et voulut le convaincre de les relâcher, ce qui eut pour résultat d’irriter Kemper.

Il s’arrêta dans un endroit désert, au milieu de la forêt. Il enferma Anita, tétanisée, dans le coffre de la voiture, puis menotta Mary Ann et la fit s’allonger, sur le ventre, sur le siège arrière. Il mit un sac plastique sur sa tête et tenta de l’étrangler avec la cordelette d’une robe de chambre. Mais elle perça le sachet avec ses dents et, en bougeant la tête, elle empêcha Kemper de lui passer la cordelette autour du cou. Frustré, irrité, Ed Kemper sortit alors son couteau et la frappa à plusieurs reprises. Mais Mary Ann ne mourut sur le coup et continua de se débattre. Il la poignarda de nouveau, mais elle tenta encore de lui parler. Stupéfait, ne sachant trop quoi faire, Kemper lui coupa finalement la gorge.
Il s’assit à l’avant, hagard, les mains et les bras couverts de sang, à la fois heureux et déconcerté.
Puis, il ouvrit le coffre et Anita le vit couvert de sang. Terrifiée, elle obéit pourtant lorsque Kemper lui ordonna de sortir du coffre. Avec un couteau plus large, Kemper la poignarda, elle aussi. Elle se débattit et hurla, mais resta debout, mordant les doigts de Kemper qui tentait de la faire taire. Kemper s’affola et la frappa à la poitrine et au cou jusqu’à ce qu’elle s’effondre.
Il la décapita, dans le coffre de sa voiture, puis remonta à l’intérieur, poussa le corps de Mary Ann sur le plancher et le recouvrit avec le drap de la banquette arrière.

Il conduisit un moment, en se demandant quoi faire. Son colocataire étant absent, il décida d’emmener les corps des deux jeunes femmes dans son appartement d’Alameda, où il les déshabilla et les photographia. Il prit le peu d’argent trouvé dans leur sac, recopia leurs papiers d’identité puis les brûla. Il les démembra et coupa la tête de Mary Ann. Il eut des relations sexuelles avec les morceaux des corps.
Il les transporta dans de grands sacs-poubelle et les enterra dans un coin reculé et sauvage, au-dessus de Santa Cruz. Il garda les têtes des jeunes femmes un moment chez lui, puis les jeta dans un ravin.

Les familles des jeunes femmes les déclarèrent toutes deux disparues le 11 mai 1972. Mais la police n’enquêta pas réellement sur leur disparition car, à l’époque, les fugues n’étaient pas rares, surtout aux alentours de « San Francisco la bohème ». Des jeunes femmes disparaissaient tous les jours, pour réapparaître tôt ou tard avec un ami ou un amant. Celles et ceux qui mourraient, victimes d’un tueur en série, étaient souvent considérés comme « un/une hippie de plus… » (À la même époque, John Wayne Gacy assassina 33 adolescents, qui avaient systématiquement été considérés comme des fugueurs par la police).

Kemper craignit un moment que l’on ne remonte jusqu’à lui. Mais les policiers ne menèrent aucune enquête sérieuse.
Lorsque le corps de Mary Ann fut découvert et identifié en août 1972, Kemper ne s’inquiéta pas outre mesure. Les enquêteurs ne pouvaient plus découvrir d’indice réellement concluant deux longs mois après sa disparition. Personne ne suspecta Ed Kemper, ce grand jeune homme poli et propre sur lui, de quoi que ce soit.

Kemper, qui aimait rouler vite, eut un second accident de moto et se brisa le bras gauche. La Division des Autoroutes lui offrit un congé maladie pour qu’il récupère. Il se retrouva donc libre de ses journées…
Il décida de faire effacer son casier judiciaire de mineur, soi-disant pour trouver plus facilement un travail, mais surtout parce qu’il voulait obtenir un permis de port d’arme.

Le jeudi 14 septembre 1972 au soir, il prit en stop Aiko Koo, 15 ans, une danseuse d’origine coréenne, qui se rendait justement à son cours de danse. Elle en avait eu assez d’attendre son bus et craignait de rater son cours de danse, très important pour elle. N’ayant pas l’habitude de faire du stop, elle avait joyeusement accepté l’offre de Kemper.
Mais, alors que Kemper se rendait vers le sud, elle comprit que quelque chose n’allait pas et paniqua lorsqu’il sortit son pistolet, un .357 Magnum. Kemper parvint pourtant à lui faire croire qu’il était dépressif et qu’il voulait utiliser son arme pour se suicider. Il lui affirma qu’il voulait juste lui parler et que si elle ne le dénonçait pas à la police ou à un passant, il la laisserait partir. Il quitta l’autoroute et conduisit alors jusqu’aux montagnes surplombant la ville, puis se gara dans un endroit isolé.
Il parvint à la convaincre de se laisser attacher et bâillonner puis tenta de la suffoquer en plaçant sa main sur son nez. Aiko se débattit de toutes ses forces, mais finit par perdre connaissance. Elle se réveilla quelques moments plus tard. Stupéfait, Kemper essaya de nouveau de l’étouffer et continua cette fois à appuyer jusqu’à ce qu’elle cesse totalement de respirer. Il la sortit ensuite de la voiture, l’allongea sur le sol et la viola. Il étrangla finalement Aiko avec sa propre écharpe. Il enveloppa son corps dans un drap et l’enferma dans son coffre.
Peu après, il s’arrêta devant un bar et prit quelques bières. À sa sortie du bar, il ouvrit le coffre pour observer le corps d’Aiko et «admirer [son] boulot». Puis, il se rendit chez sa mère et discuta comme si de rien n’était. Il trouva grisant que sa mère ne se doute de rien et qu’il puisse « l’embobiner ».
Vers 21h30, il quitta sa mère et ouvrir de nouveau son coffre pour regarder Aiko Koo.
Tard dans la nuit, il rentra à son appartement d’Alameda et porta le corps d’Aiko jusqu’à son lit. Il fouilla son sac pour tenter d’en savoir plus sur elle et fut déçu lorsqu’il réalisa qu’elle n’était pas une jeune femme « de la haute société ».
Il la démembra, coupa sa tête et ses mains, et découpa des lambeaux de chair qu’il mit au réfrigérateur. Puis, il glissa le reste de son corps dans des sacs-poubelle.
Le lendemain, il cuit la chair dans une casserole de macaronis avec du fromage, «comme une charogne». Il allait expliquer par la suite qu’il ne faisait «que poursuivre une expérience cannibalistique» et ajouter : «je possède à nouveau ma victime en la mangeant».

Le samedi 16 septembre, il rendit visite à deux psychiatres de Fresno pour tenter de les convaincre d’effacer son casier judiciaire. Sur la route, il jeta des morceaux du corps d’Aiko dans les montagnes, dont ses mains. Il garda la tête dans son coffre et elle s’y trouvait toujours lorsqu’il se présenta chez les deux psychiatres.
Il les impressionna par son calme et les convainquit qu’il désirait réellement changer de vie, qu’il était « intelligent et équilibré ». L’un d’eux déclara que «Edmund Emil Kemper n’est plus une menace ni pour lui-même, ni pour les autres». Ils demandèrent que son casier judiciaire de mineur soit effacé.
Fin novembre, le tribunal confirma l’avis des deux experts et Kemper retrouva un casier judiciaire parfaitement vierge.

A la fin du mois de janvier 1973, un squelette fut découvert par des promeneurs, celui de Mary Guilfoyle, une étudiante de 23 ans disparue le 24 octobre 1972. Un mois plus tard, l’assassin de Mary Guilfoyle fut arrêté : c’était Herbert Mullin, un autre tueur en série de Santa Cruz, schizophrène paranoïde.
Kemper fut courroucé que les médias et la police attribuent « ses » meurtres (ceux de Mary Ann Pesce et Anita Luchese) à Mullin car il considérait que le meurtre de Mary Guifoyle était « mal fait, torché à la va-vite ».

Kemper n’était toujours pas soupçonné de quoi que ce soit, et il s’était même fiancé avec la belle-sœur de son ancien patron, une femme qu’il appréciait et respectait.
Mais, à cause de son bras qui ne guérissait pas, le médecin du travail avait refusé qu’il retrouve son emploi. À court d’argent, Kemper ne pouvait plus payer le loyer de son appartement à Alameda, et dut se résoudre à revenir chez sa mère, où les disputes recommencèrent aussitôt. Il se remit donc à boire, passant des heures au « Jury Room ». Il était presque toujours ivre et ingurgitait chaque jour des litres et des litres de bière.

crown merrill
Logements étudiants à l’Université de Santa Cruz

Le 8 janvier 1973, il acheta un pistolet automatique de calibre .22. Il était tellement excité qu’il se rendit le soir même sur le campus de l’Université de Santa Cruz, dangereusement proche du domicile de sa mère.
Il pleuvait à torrent et une jeune femme blonde, Cinthia Schall, dite Cindy, une étudiante de 18 ans qui se destinait à l’enseignement, fut heureuse de trouver refuge dans le véhicule de Kemper. Mais à peine était-elle montée qu’il lui mit sous le nez l’automatique qu’il venait d’acheter. Il parvint néanmoins à la calmer en lui racontant la même histoire de suicide qu’à Aiko Koo.
Il conduisit durant 2 ou 3 heures, jouant avec elle, calmement, alors qu’elle le suppliait de ne pas la tuer. Il la conduisit vers le sud, jusqu’aux collines près de Watsonville, où il lui annonça qu’il allait l’emmener pour parler à sa mère. Affirmant qu’il ne voulait pas que ses voisins le voient avec une jeune femme, il la convainquit de monter dans son coffre. Lorsqu’elle se tourna pour s’allonger, il lui tira dans la tête avec son nouveau pistolet.
Il ramena ensuite le corps dans le duplex de sa mère, qui était absente, et le monta dans sa chambre. Lorsque sa mère revint, il discuta un moment avec elle avant d’aller se coucher. Il dormit peu, impatient que sa mère s’en aille et le laisse seul.

Le lendemain matin, lorsque sa mère partit au travail, il eut des relations sexuelles avec le corps de Cindy. Il la démembra ensuite dans la baignoire et prit soin de bien nettoyer toutes les taches et les traces de sang, notamment sur son plâtre. Il plaça les morceaux du corps de la jeune femme dans des sacs-poubelle.
Il récupéra la balle dans le crâne de Cindy et garda sa tête dans son placard. Il garda également l’une de ses bagues « en souvenir ». Puis, il roula sur l’autoroute en direction de Monterey et, au sud de Carmel, il jeta les sacs-poubelle du haut d’une falaise.

Le lendemain même, les sacs furent découverts par un motard et le corps de Cindy Schall fut identifié. Lorsqu’il apprit la nouvelle, Kemper, affolé, alla immédiatement enterrer la tête de la jeune femme dans le jardin, sous la fenêtre de la chambre de sa mère. Mais ses inquiétudes disparurent rapidement.

Dans la nuit du 5 février 1973, Ed Kemper et sa mère eurent une terrible dispute et il sortit de chez elle comme un boulet de canon, en claquant violemment la porte. Il se jeta dans sa voiture et partit à toute allure, se dirigeant vers le campus de l’université.
Il pleuvait également ce soir-là et une conférence avait été organisée, attirant de nombreux étudiants. Kemper avait collé un autocollant de l’Université de Santa Cruz (fourni par sa mère…), bien en évidence sur le pare-brise.
Il prit en stop Rosalind Thorpe, 23 ans, étudiante en linguistique et en psychologie. Elle le prit pour un autre étudiant à cause de l’autocollant apposé sur son pare-brise. Très ouverte et en confiance, elle engagea la conversation.
Alors qu’il allait quitter le campus, Kemper aperçut une autre auto-stoppeuse, d’origine chinoise, Alice Liu, 21 ans. Elle était en dernière année et habitait, tout comme Rosalind, à Santa Cruz. Elle n’hésita pas à monter dans la voiture lorsqu’elle vit que Rosalind y était déjà.
Ils roulèrent pendant un moment et, cette fois, Kemper n’arrêta même pas son véhicule pour attaquer ses victimes.
Il attira l’attention de Rosalind vers un joli point de vue sur sa droite et, alors qu’elle tournait la tête, il ralentit, sortit son pistolet et lui tira dans la tête. Il pointa ensuite son arme sur Alice, à l’arrière, et tira sur elle plusieurs fois. Contrairement à Rosalind, elle ne mourut pas immédiatement. Une fois en dehors de la ville, Kemper s’arrêta et lui tira dans la tête à bout portant. Puis, il transféra rapidement les corps des deux jeunes femmes dans son coffre.
Il s’arrêta tranquillement sur le chemin du retour pour prendre de l’essence et nettoyer son plâtre, puis revint chez sa mère. Il ressortit rapidement, prétextant avoir besoin de cigarettes. En fait, il repartit à la voiture, ouvrit le coffre et décapita les deux corps.

Eden Canyon road
Eden Canyon road

Le lendemain matin, après le départ de sa mère, il porta le corps sans tête d’Alice Liu dans sa chambre et le viola. Il ôta les balles des deux têtes, comme il l’avait fait pour celle de Cindy Schall. Il coupa les mains des deux jeunes femmes, mais ne démembra pas les corps, car cela ne «l’excitait plus». Il voulait juste se «débarrasser» des corps aussi rapidement que possible.
Il sortit de Santa Cruz avec les corps décapités dans son coffre et alla rendre visite à un ami, au nord de la ville. Il mangea et alla au cinéma, puis, vers deux heures du matin, il se rendit sur Eden Canyon Road, où il jeta les corps décapités. Il continua ensuite jusqu’à Pacifica, où il abandonna les têtes et les mains des deux jeunes femmes.

Les journaux annoncèrent la disparition des deux étudiantes le 8 février et des collègues de Kemper, de la Division des Autoroutes, découvrirent les corps le 14 février.
La police forma une équipe pluri-juridictionnelle (Kemper avait tué dans quatre comtés différents) pour tenter de trouver le tueur, sans résultat. Malgré tout, Kemper décida de se séparer de certains « souvenirs » qu’il avait gardés de ses victimes et les jeta à la mer.

Sur les nerfs, totalement alcoolique, Kemper commençait vraiment à sombrer.

Sa mère semble ne jamais l’avoir soupçonné du moindre crime après sa sortie d’Atascadero. Mais durant le week-end de Pâques, environ un mois après avoir assassiné Rosalind et Alice, Kemper décida de la tuer.
Après avoir beaucoup bu dans la soirée, il attendit toute la nuit dans sa chambre alors qu’elle dormait tranquillement, réfléchissant à ce qu’il allait faire.
Le 21 avril 1973, vers 4 ou 5h du matin, il se leva, un marteau à la main, et entra dans la chambre de sa mère. Il la frappa de toutes ses forces, à la tête, puis sortit un couteau et l’égorgea. Il la décapita, découpant le larynx, qu’il jeta dans le vide-ordure.
Il utilisa ensuite sa tête, posée sur la cheminée, comme cible pour un jeu de fléchettes et eut des rapports sexuels avec son corps (deux faits établis qu’il continue pourtant de nier).
Il cacha son corps dans une armoire, nettoya un peu la cuisine et quitta la maison.

Durant l’après-midi, il se demanda comment il allait expliquer l’absence de sa mère. Il pensa que si elle devait être partie en vacances durant le week-end de Pâques, il serait plus crédible qu’elle soit accompagnée d’une amie.
En retournant dans le duplex, il appela Sara Hallett, une amie de sa mère, pour l’inviter à dîner, mais elle ne répondit pas. Il commença à s’inquiéter, mais Sara Hallett appela elle-même vers 17h, pour prendre des nouvelles. Kemper l’invita donc, affirmant que le dîner serait une surprise pour sa mère. Mais lorsque Mme Hallett arriva, il l’assomma puis l’étrangla. Pour la première fois, il eut un orgasme durant l’acte même du meurtre.
Il déposa le corps sur son lit, la tête enveloppée d’un sac en papier, puis alla boire quelques bières au « Jury Room ».
De retour dans le duplex, il décapita le corps de Sara Hallett et s’endormit dans le lit de sa mère.

Le lendemain matin, un dimanche, il plaça le corps dans le placard de sa chambre.
Il quitta la ville dans la voiture de Sara Hallett. Il conduisit durant des heures, vers l’est, à Sacramento, ne s’arrêtant que pour reprendre de l’essence, des sodas et des pilules énergétiques contre le sommeil. Il se rendit à Reno, à la frontière du Nevada. Craignant qu’on ne le repère, il loua une autre voiture et abandonna celle de Sara Hallett à une station service, expliquant au garagiste qu’elle avait besoin d’être réparée. Après 17h de conduite, il fut arrêté au Colorado, à 2000 km à l’est de Santa Cruz, pour avoir dépassé les limites de vitesse, mais il resta calme et le policier le laissa partir après qu’il a payé sa contravention.
Finalement, épuisé et tremblant après plus de 30 heures de route, il s’arrêta à Pueblo, dans le Colorado. Il avait allumé la radio, mais tout le long du chemin, personne n’avait parlé du meurtre de sa mère et de Sara Hallett. Il ne savait pas s’il devait être déçu ou soulagé, exalté ou désespéré. Il était partagé entre la peur d’être appréhendé et la frustration, car personne ne semblait s’intéresser à lui.

ed kemper arrêté

À bout de nerfs, dans la nuit du 23 avril 1973, il appela la police de Santa Cruz, où plusieurs officiers le connaissaient pour l’avoir côtoyé au bar le « Jury Room ». Il avoua les meurtres qu’il avait commis. Mais il dut d’abord convaincre la police que ce n’était pas un canular et dut rappeler par trois fois ! Il leur indiqua où trouver les corps de sa mère et de Sara Hallett. Puis, il dut leur expliquer où il se trouvait pour qu’ils viennent le chercher. Mais il était désorienté et eut bien du mal à diriger les policiers jusqu’à la cabine téléphonique d’où il passait son appel.
Il expliqua au policier, qui tentait de le faire parler pour qu’il ne s’en aille pas, qu’il avait des armes et des munitions dans son coffre et ne voulait pas avoir à s’en servir.

Après qu’il a été appréhendé par les policiers de Pueblo, certains des enquêteurs de Santa Cruz le rejoignirent au Colorado pour l’interroger au sujet des crimes qu’il affirmait avoir commis. Ses aveux furent enregistrés et Kemper offrit une confession incroyablement explicite et détaillée des huit meurtres.

Kemper scène de crime enquêteurs
Kemper sur l’une des scènes de crime avec les enquêteurs

On le laissa dormir, puis les policiers le reconduisirent à Santa Cruz où, dans les jours qui suivirent, il mena les enquêteurs aux différents endroits où il avait jeté les morceaux des corps, leur montra les objets qu’il avait volés à ses victimes -et gardés- (foulard, photos, vêtements…), tout en leur expliquant minutieusement comment il avait procédé.

Il leur donna également les armes qu’il avait utilisées. La police scientifique fit apparaître des taches de sang sur les sièges et dans le coffre de sa voiture.

Lorsqu’il eut enfin terminé sa confession, son avocat commis d’office, James Jackson, considéra que la seule chose à faire était de plaider la folie… en se basant sur le diagnostic de paranoïa et de schizophrénie qui avait été attribué à Kemper, après qu’il a tué ses grands-parents, des années auparavant.
Mais sa tâche allait se révéler difficile, car la confiance de la population locale dans les psychiatres était faible. Herbert Mullin venait d’être reconnu coupable de 13 meurtres et considéré comme sain d’esprit alors qu’il était incontestablement un schizophrène paranoïde. Tout comme Kemper, il avait été interné dans des hôpitaux psychiatriques et relâché lorsqu’on l’avait considéré « guéri ».
Kemper lui-même n’avait aucune illusion et déclara aux médias que le procès serait seulement « une manière de décider par quelle méthode je ne verrai plus jamais la société. Et, moi-même, je pense qu’il vaut mieux que je ne la revoie plus jamais. »

Le 17 mai 1973, on découvrit les restes du corps d’Aiko Koo dans les montagnes et la population recommença à s’affoler.
A l’époque, Santa Cruz était surnommée la « capitale du crime » car de nombreux meurtres y étaient commis.

John Frazier
John Frazier

Le 19 octobre 1970, la famille Otha et sa secrétaire avaient été assassinées par un jeune marginal de 24 ans, John Linley Frazier, qui avait laissé un message mystique coincé sous l’essuie-glace de la voiture, faisant craindre l’apparition d’un « suiveur » de Charles Manson. Il était, lui aussi, atteint de schizophrénie paranoïde et vivait en liberté pour les mêmes raisons que Mullin et Kemper : le gouverneur de Californie, Ronald Reagan, avait supprimé toutes aides aux établissements de soins psychiatriques, qui fermaient les uns après les autres.
Herbert Mullin a assassiné 13 personnes, hommes, femmes et enfants, entre octobre 1972 et février 1973.

Le procès de Kemper s’ouvrit le 25 octobre 1973 avec la diffusion des aveux enregistrés de Kemper.

kemper au tribunal
Kemper au tribunal

Puis, les avocats de la défense présentèrent de nombreux témoins dans le but de prouver que Kemper n’était pas responsable de ses crimes, mais le procureur désintégra littéralement leurs témoignages, les uns après les autres.
Le Docteur Joel Fort, de l’accusation, affirma que Kemper n’était absolument pas fou. Il avait passé des heures à analyser son cas, remontant jusqu’au premier diagnostic, après qu’il a tué ses grands-parents, et à celui établi à Atascadero. Il avait également interrogé Kemper, mettant à jour des informations jusqu’alors inconnues, notamment sur ses pratiques sexuelles nécrophiles et son cannibalisme.
Selon le Docteur Fort, Kemper n’était pas un schizophrène paranoïde, mais un sociopathe, responsable de ses actes. Il était obsédé par le sexe et la violence, et il sollicitait constamment l’attention (il alla jusqu’à se couper le poignet avec son stylo à bille durant le procès), mais il n’était pas mentalement aliéné. De plus, expliqua Fort, si Ed Kemper était jamais libéré, il tuerait de nouveau, et il tuerait le même genre de victimes.

kemper proces

Pour la défense, l’une des sœurs de Kemper, Allyn, vint témoigner des événements étranges qui s’étaient déroulés durant son enfance. Elle expliqua qu’elle l’avait soupçonné des meurtres lorsque les médias avaient révélé que les jeunes femmes avaient été décapitées : elle savait que son frère portait en lui ce fantasme depuis l’enfance.
Kemper témoigna pour lui-même, parlant de sa vie intérieure. Il se montra timide, nerveux et hésitant, la larme à l’œil, très différent du vantard que les jurés avaient entendu sur les aveux enregistrés.

Durant les trois semaines que dura le procès, aucun témoin, pas même les sœurs de Kemper ou ses médecins d’Atascadero, ne parvint à convaincre les jurés que Kemper était fou.
Le 8 novembre 1973, ils délibérèrent durant cinq heures avant de déclarer Edmund Kemper coupable de huit meurtres avec préméditation et condamné à la prison à perpétuité (la peine de mort a été suspendue entre 1971 et 1974).
Il fut envoyé à la prison de Vacaville, près de San Francisco, la plus peuplée des États-Unis. Il n’a jamais fait appel.

Edmund Kemper est toujours derrière les barreaux. Il est considéré comme un prisonnier modèle. Il a été interrogé plusieurs fois par des spécialistes, notamment du FBI, et a ainsi permis de mieux comprendre le fonctionnement des tueurs en série.

Robert Ressler, Ed Kemper et John Douglas

Il semble très fier de son statut de « tueur en série génial » (il a un Q.I. de 136) qui a permis sa propre capture et sa condamnation.
Il a affirmé ne plus avoir envie de tuer depuis qu’il a assassiné sa mère, mais comprend parfaitement que personne n’ait envie de le relâcher pour autant. Il préfère rester en prison…

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