Article mis à jour le 24 août 2022

Les victimes d’Aileen Wuornos

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Richard Mallory (51 ans)
Assassiné le 1er décembre 1989.
Son corps fut découvert le 13 décembre dans le comté de Volusia, abattu de plusieurs balles de calibre .22.

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Charles « Dick » Humphreys (56 ans)
Assassiné le 19 mai 1990.
Son corps fut découvert le 12 septembre 1990 dans le comté de Marion, abattu de six balles.

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Charles Carskaddon (40 ans)
Assassiné le 31 mai 1990.
Son corps fut découvert le 6 juin dans le comté de Pasco, abattu de neuf balles.

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David Spears (43 ans)
Son corps fut découvert le 1er juin 1990 le long de l’autoroute 19 dans le comté de Citrus, abattu de six balles.

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Troy Burress (50 ans)
Assassiné le 30 juillet 1990.
Son corps fut découvert le 4 août dans un bois près de la State Road 19, dans le comté de Marion, abattu de deux balles.

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Peter Siems (65 ans)
Assassiné en juin 1990.
Son corps ne fut jamais retrouvé, mais son véhicule fut découvert le 4 juillet, abandonné à Orange Springs, Comté de Marion, par Wuornos et Moore.

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Walter Jeno Antonio (62 ans)
Assassiné le 19 novembre 1990.
Son corps fut découvert le même jour près d’une route dans le comté de Dixie, abattu de quatre balles.

Mode opératoire

Wuornos faisait du stop sur l’autoroute. Elle se présentait comme simple auto-stoppeuse et souvent, elle proposait de coucher avec les hommes qui acceptait de la prendre, mais il est possible qu’au moins une de ses victimes l’ait « levée » lorsqu’elle se prostituait.

Elle sortait son pistolet de son sac et ordonnait au conducteur de s’arrêter sur le bord de la route. Puis, elle l’abattait, parfois directement dans le véhicule, plus souvent après en avoir fait sortir sa victime.

Elle empochait ensuite tout ce qu’elle pouvait trouver, argent et objet qu’elle revendait par la suite. Elle s’en est toujours pris à des hommes qui avaient beaucoup d’argent sur eux, ou des objets de valeur. Parfois, elle a également volé les plaques d’immatriculation des véhicules ou les véhicules eux-mêmes.

Wuornos a affirmé avoir tué ses victimes en état de légitime défense, mais elle a tiré neuf fois sur Charles Carskaddon et six fois sur Charles Humphreys et David Spears. Plusieurs fois, elle a tiré dans le dos de ses victimes alors qu’ils se trouvaient en dehors de leur véhicule.

D’après ses explications, sa première victime, Richard Mallory, l’a prise en stop et c’est elle qui lui a proposé de « s’amuser » en échange de quelques dollars. Il a accepté et ils ont commencé à boire de la vodka. Passablement éméchés, ils se sont arrêtés sur le bas-côté de la route. Mallory a alors voulu « passer aux choses sérieuses » mais Wuornos l’a repoussé. Ils ont commencé à se battre et Wuornos a saisi son pistolet dans son sac…

Certains enquêteurs sont persuadés qu’Aileen Wuornos a fait plus de sept victimes, mais certains corps n’ont jamais été retrouvés ou identifiés.

Motivations

Après son arrestation, nombreux furent celles et ceux qui accusèrent Aileen Wuornos d’être une « lesbienne qui hait les hommes », comme si son orientation sexuelle avait pu être la raison de ses meurtres. Cette allégation concernant sa sexualité était basée sur sa relation avec Tyria Moore, qu’elle appelait son « épouse » (étrangement, Moore, avec ses cheveux roux, ses taches de rousseur et ses épaules carrées, ressemblait beaucoup au père biologique de Wuornos, Leo Pittman).
Wuornos était en fait bisexuelle. Elle a eu d’autres petites amies, mais a également eu des relations sentimentales (et non pas uniquement sexuelles et « commerciales ») avec des hommes.

En 1981, l’un de ses petits amis rompit avec elle et, comme elle était très amoureuse et pensait ne pouvoir vivre sans lui, elle décida de se suicider. Elle se saoula et acheta un pistolet. Incapable de le retourner contre elle, elle l’utilisa en fait pour dévaliser un supermarché, vêtu seulement d’un bikini ! Elle passa 18 mois en prison et, à sa sortie, elle s’installa avec un homme qu’elle avait rencontré au pénitencier.

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Elle disait souvent qu’elle aimait le sexe avec les hommes. Sa vie sexuelle avec Tyria Moore était si faible que Moore s’en plaignit à sa meilleure amie. Wuornos elle-même affirmait que son amour pour Tyria Moore « n’était pas sexuel ».
La véritable force qui conduisait la vie de Wuornos n’était pas du tout sexuelle. C’était la recherche d’un lien émotionnel, de l’amour avec un grand « A ». L’amour qu’elle n’a jamais réellement connu, de la part de sa mère absente, de son grand-père violent et abusif et de sa grand-mère qui ne l’a pas protégée de lui. Et certainement pas des jeunes hommes brusques avec lesquels elle a couché durant son enfance et son adolescence.
En fait, durant toute sa jeunesse, Aileen Wuornos n’a pas eu une seule relation qui ait été positive, saine ou fortifiante avec un homme…
Wuornos avait trouvé en Tyria Moore le lien émotionnel profond dont elle avait tant besoin. Son caractère instable aiguillonnait également une terrible peur d’être abandonnée.

Selon Sue Russel, l’auteur du livre « Lethal Intent », six des sept meurtres qu’a commis Wuornos correspondent à des dates durant lesquels elle avait des problèmes relationnels avec Tyria Moore et avait peur de la perdre. Cette peur aurait pu être le « déclencheur » qui la conduisait à tuer et à voler, ce que l’on appelle le « facteur précipitant ».
Lorsqu’elle était enfant, Aileen Wuornos avait tenté « d’acheter » l’amitié de ses voisins et de ses camarades de classe avec de l’argent qu’elle se procurait en se prostituant. De la même manière, elle tenta d’acheter la présence continue de Tyria en lui montrant des centaines de dollars, qu’elle avait volés à ses victimes, et en lui annonçant qu’elles allaient pouvoir s’amuser.
Dans l’esprit de Wuornos, pour garder Tyria Moore, elle avait besoin d’argent. Presque sans exception, elle a tué des hommes qui avaient plusieurs centaines de dollars sur eux. Comme elle avait du mal à trouver des clients en tant que prostituée, ces grosses sommes d’argent représentaient beaucoup pour elle.
Elle avait pour habitude de rentrer à la maison en souriant après un meurtre, en exhibant cet argent volé et en promettant à Tyria qu’elle allait pouvoir payer le loyer, acheter des bières, leur payer une entrée à Seaworld (un parc d’attractions nautique), faire la fête, etc.
Plus tard, Wuornos admit que Tyria Moore était avide et vénale. Et il lui semblait que l’argent lui permettait de la garder à ses côtés. C’est ce qu’elle croyait, en tout cas.

La sœur de Tyria a vécu avec les deux femmes durant trois semaines, une période pendant laquelle Wuornos a tué trois hommes. Les deux sœurs étaient très proches et Wuornos était désorientée, terrifiée à l’idée que, lorsque sa sœur repartirait dans l’Ohio, Tyria la suivrait.

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Il ne semble pas qu’Aileen Wuornos ait éprouvé un plaisir sexuel à tuer des hommes – comme le font nombre de tueurs en série masculins – mais ses crimes avaient une composante sexuelle évidente, une composante d’humiliation sexuelle.
Plusieurs victimes ont été trouvées nues et il est probable que Wuornos les forçait à se déshabiller devant elle.
Il est certain qu’elle aimait le sentiment de pouvoir et de domination qu’elle ressentait en tenant la vie d’un homme entre ses mains.

Elle ne voulait pas laisser de témoins derrière elle. Elle avait toujours du produit nettoyant dans son sac, avec son pistolet, afin d’effacer toutes empreintes dans les véhicules des victimes et ne laisser aucune trace.

Wuornos rêvait d’être une héroïne pour les femmes. Elle croyait que son allégation de légitime défense serait facilement acceptée et tomba de haut lorsqu’elle fut cataloguée « tueuse en série ».
Quelques mois avant d’être exécutée, elle avoua pourtant la vérité : elle avait tué de sang-froid, ses victimes ne l’avaient pas agressée… sauf la première, Richard Mallory.

Wuornos désirait plus que tout attention, célébrité et argent. Cammie Green, dont elle avait volé le nom, pense qu’elle avait longtemps pensé tuer des hommes, puis vendre son histoire et devenir riche. « Elle disait ‘Je vais faire quelque chose qu’aucune femme n’a jamais fait avant et tout le monde me respectera’. J’ai toujours su que quelque chose de grave allait se passer. Et Tyria a toujours été au courant ».
En prison, Wuornos se révéla désagréable, sans aucun remord, exigeante et avide d’argent. Elle voulait être payée pour donner des interviews et collectionnait toutes les coupures de presse à son sujet. Elle rabrouait durement les gardiens de prison qui ne lui montraient pas, selon elle, la considération qu’elle méritait : « Vous ne savez pas qui je suis ? Je suis Aileen Wuornos, de la télévision ».

On a dit que Wuornos détestait les hommes. En fait, il serait plus juste de dire qu’elle détestait le monde entier. Elle était profondément en colère contre tout le monde.

Inévitablement, ses explosions de rage, son sale caractère et son tempérament changeant faisaient fuir les rares personnes qui tentaient de se lier avec elle.
Cammie Greene expliqua : « Elle avait une mauvaise attitude. Je suis sûre que beaucoup d’hommes lui ont fait du mal, mais elle détestait les gens en général ».

Citations

« C’était un prédateur homicide […], comme une araignée sur le bord de la route, attendant ses proies, des hommes » : l’un des procureurs lors de son procès.

« Elle a eu une enfance pourrie. Je pense que ça a quelque chose à voir avec ce qu’elle est devenue… Ses grands-parents n’étaient pas très sociables. Ils ne s’associaient avec personne. Elle a eu une vie misérable. Les gens ne peuvent agir que de la manière dont ils sont traités » : une ancienne voisine des Wuornos.

« (C’est) la personne la plus dérangée que je n’ai jamais eu à représenter » : Billy Nolas, l’avocat de Wuornos en 1992.

« Je les ai volés et je les ai tués, aussi froide que la glace, et je le ferai encore, et je sais que je tuerai d’autres personnes parce que je déteste les êtres humains depuis longtemps » : Aileen Wuornos.

« Elle aime contrôler les choses. En fait, ces meurtres étaient des actes de contrôle ultime, et nous avons déjà vu cela chez les tueurs en série auparavant. Elle tuait ces hommes pour obtenir le contrôle ultime sur leur vie, qui était de les terminer » : John Tanner, procureur du comté de Volusia.

« On entendait [Lauri Wuornos] hurler à l’autre bout de la rue. C’était simplement la manière dont il leur parlait. Il ne les traitait pas comme des êtres humains. Il les traitait pire que quiconque aurait traité un animal » : Cheryl Stacy, une ancienne voisine des Wuornos, au sujet d’Aileen et Keith Wuornos.

Bibliographie

Livres en français :
Monster : Autobiographie d’une serial-killer
Critique : Le livre est écrit par Christopher Berry-Dee et non par Aileen Wuornos elle-même. Il se contente de citer des extraits de journaux, des interviews, d’autres livres sur Wuornos. Le livre présente peu d’éléments sur son enfance et, en général, peu d’informations réellement pertinentes.

Livres en anglais :

Dead Ends
Critique : Les premiers chapitres sont un peu confus car l’auteur, Michael Reynolds, nous présente d’abord les rapports d’enquête et les différentes forces en présence. Il devient nettement plus intéressant lorsqu’il s’intéresse aux victimes et au duo meurtrier.

Lethal Intent
Critique : Sans doute le meilleur ouvrage écrit sur Aileen Wuornos. L’auteur présente en détail la jeunesse de Wuornos, ses crimes, son errance, sa relation avec Tyria Moore, l’enquête qui a mené à son arrestation, le procès, l’opinion des psychiatres, les dénégations de Wuornos… Elle évite, autant que possible, de sombrer dans le sensationnalisme, bien que le sujet et la personnalité de Wuornos s’y prêtent aisément.

Filmographie

– Le téléfilm “Overkill: The Aileen Wuornos Story”, réalisé par Peter Levin, a été diffusé en 1992. Le rôle d’Aileen Wuornos y est joué par Jean Smart, une jolie blonde qui ne lui ressemble absolument pas. Le scénario suggère que les crimes de Wuornos seraient directement liés aux abus sexuels qu’elle a subis durant son enfance.

– “Damsel of Death” (2002), réalisé par Jackelyn Giroux, qui joue également le rôle de Wuornos et ne lui ressemble pas plus que Jean Smart, est un film de série B qui présente presque Wuornos comme une victime.

Aileen Wuornos: Selling of a Serial Killer
Résumé : Le documentaire de Nick Broomfield, diffusé en 1994, s’intéresse à l’enquête et au procès de la tueuse, en y ajoutant une critique sociale et politique, notamment sur la peine de mort et l’avidité des médias. Il s’attache plus au côté sensationnaliste et tumultueux de cette affaire qu’aux crimes eux-mêmes.

Aileen: Life & Death of a Serial Killer
Résumé : Cet autre documentaire de Broomfield présente la vie de Wuornos plus en détails et tente de comprendre comment elle a « pu en arriver là ». Broomfield explique que l’enfance catastrophique de Wuornos a joué un rôle essentiel dans la création de la Wuornos adulte, une tueuse de sang-froid, sans le moindre remord… et peut-être atteinte d’un désordre de la personnalité qui la fait exploser de colère sans raison valable. Il affirme en tout cas qu’après plus de 10 ans passés dans le couloir de la mort, elle avait sûrement perdu l’esprit.

Monster
Critique : C’est un bon film, soutenu par une incroyable actrice. Charlize Theron y est franchement impressionnante, même si malheureusement, elle en fait parfois un peu trop. Christina Ricci, très bien elle aussi, qui joue le rôle de “Selby” ressemble peu -physiquement- à Tyria Moore (de manière intentionnelle, car Moore est toujours en vie et considérée comme innocente de tout crime). Ce film, bien qu’un peu trop dramatique, est le plus proche de la véritable histoire de Wuornos. Il trouve des excuses plus que des explications aux crimes de Wuornos (ces victimes sont presque toutes des « sales types »), mais ne cherche pas vraiment à la rendre sympathique (ou n’y parvient pas). Il expose avec raison la pauvreté accablant une certaine Amérique et l’obsession de « Selby » pour l’argent, ainsi que la vie sordide qu’ont menée les deux femmes durant des années, malgré les rêves de gloire de Wuornos.

Liens

– L’état de Floride : le département d’état, site officiel (en anglais)
– Les différents comtés de Floride : Florida County Maps (en anglais)
– Aileen Carol Wuornos : portrait de Wuornos sur le site d’un procureur de l’Indiana (en anglais)