Article mis à jour le 12 décembre 2022
Nom : Gustavo Adolfo Parada Morales
Surnom : « El Directo ».
Né le : 25 janvier 1982, à San Miguel, près de San Salvador – Le Salvador.
Mort le : 2 septembre 2013, poignardé en prison.
À 17 ans, il a été condamné pour le meurtre de 7 personnes, dont plusieurs femmes qu’il a violées. Membre d’un gang dans une banlieue pauvre, cet adolescent a horrifié l’opinion publique salvadorienne, pourtant habituée à la violence. Son jeune âge et la sauvagerie de ses crimes y sont pour quelque chose.
Informations personnelles
Gustavo Morales, que ses amis appellent « Tavo, » a grandi dans la banlieue très pauvre de San Miguel, à environ 130km à l’est de la capitale du Salvador.
À 10 ans, sa mère l’a retiré de l’école a priori « parce que les autres enfants le battaient tous les jours ». Mais il semblerait que la mère d’Adolfo Morales était une femme violente qui le frappait.
Il a trouvé un emploi dans une boulangerie, travaillant le matin et passant ses après-midi à jouer au football dans les rues avec un ballon de chiffon.
Dès 13 ans, il est entré dans un gang (un « mara« ), dont la plupart sont dirigés par des criminels salvadoriens qui vivaient aux États-Unis et ont été expulsés au Salvador.
Il ne semble pas que son père ait été très présent, s’il n’en a jamais eu un.
Crimes et châtiment
En avril 1999, cet adolescent de 17 ans a été accusé du meurtre de 17 personnes au Salvador.
Comme les preuves étaient un peu « légères » pour 10 des meurtres, le juge a décidé que Gustavo Adolfo Morales ne serait inculpé que pour les meurtres de 7 personnes et l’a condamné à 7 ans de prison : la sentence maximum pour un mineur au Salvador, quelque soit son crime ! Morales pouvait donc être libéré en 2003 pour bonne conduite.
Cette affaire a provoqué la création d’un « mouvement national » qui tente de changer la loi concernant les peines encourues par des mineurs.
Gustavo Morales a juré qu’il était innocent, et qu’il était persécuté à cause de « son style », et non pas des preuves qui pourraient exister contre lui. « Mes mains n’ont pas tué » a-t-il dit lors d’une conférence de presse. « Le juge pense que c’est moi à cause de mes tatouages et de mes vêtements. Personne ne me croit. »
La mère de Gustavo Adolfo, Dora Alicia Morales, a prétendu que son fils ne pourrait jamais avoir commis des crimes aussi affreux. « Il n’aurait jamais pu violer qui que ce soit ! ».
Elle a également affirmé que Gustavo a rejoint le gang « Salvatrucha » simplement parce qu’il aimait porter des jeans « baggy »… Elle a dit à l’agence ‘Associated Press’ : « Les filles viennent toujours le chercher », « Mon fils n’est pas un monstre. Tout le monde l’accuse sans le connaître ».
Son premier meurtre – et l’un de ceux pour lequel il a été condamné – était celui d’une toute jeune femme avec qui il sortait. Il avait 14 ans, et elle avait repoussé ses avances sexuelles. Selon l’accusation, il l’a enlevée et l’a emmenée dans un endroit isolé, où il l’a violée. Il a coupé sa poitrine avec un couteau et a jeté la jeune femme – encore vivante – dans un puits, où il l’a laissé agoniser…
L’accusation a affirmé que d’autres membres de son gang ont corroboré cette version.
L’accusation n’a pas voulu fournir plus de détails concernant les 6 autres meurtres, excepté que lors de plusieurs d’entre eux, il y avait eu viol.
Il est très rare qu’un meurtrier face les premières pages des journaux au Salvador, mais les procureurs ont expliqué que Gustavo Adolfo Morales s’était distingué par sa grande brutalité.
Bien que le Salvador soit l’un des pays les plus violents au monde (de nos jours, le taux de meurtres est 12 fois plus élevé qu’à New York, et plus de gens sont tués chaque semaine que durant la Guerre Civile), cet adolescent et ses crimes ont choqué la nation tout entière.
En 1999, environ 20 familles se sont enfuies du quartier où Gustavo Morales avait grandi, lorsque le jeune tueur – avec 7 autres mineurs en détention provisoire – a assommé un surveillant et s’est enfui durant quelques heures. « Je suis partie parce que j’avais peur et parce qu’on m’avait prévenue que le gang allait enlever l’une de mes filles », a dit une voisine, qui n’a pas donné son nom par peur des représailles.
Heureusement, ils ont pu rapidement revenir chez eux puisque Gustavo Morales a été capturé alors qu’il tentait de monter dans un bus.
Son évasion a également poussé le président, Francisco Guillermo Flores Perez, à proposer l’élimination de certaines protections pour les criminels mineurs.
Un groupe de rap local, Mecate, a sorti une chanson qui raconte les « exploits » de Gustavo Adolfo Morales. Cette chanson a fait un hit sur les radios locales, jusqu’à ce que le Ministre de l’Intérieur appelle officiellement les stations de radio pour leur rappeler « le droit du gouvernement à interdire une chanson qui offense la décence publique »…
Gustavo Adolfo Morales a été emprisonné dans la zone de haute sécurité d’un centre de détention, une ancienne caserne de l’armée. Ses codétenus étaient des hommes, des adultes détenus pour des crimes qu’ils avaient commis quand ils étaient mineurs.
En février 2002, il a accordé une interview à un journal. Il a expliqué avoir changé, être devenu meilleur, avoir étudié et avoir appris à travailler de ses mains.
Il voulait faire enlever ses tatouages et quitter le Salvador pour exercer le métier de charpentier. Il affirmait avoir « trouvé Dieu ».
Il a été libéré pour bonne conduite en 2002, un an avant la date prévue pour une libération sur parole.
Il a de nouveau été arrêté, peu après, pour possession illégale d’une arme à feu.
Puis en 2003, pour un vol de bicyclette.
À chaque fois, il a expliqué avoir été au mauvais endroit au mauvais moment, pauvre victime de coïncidences et de policiers corrompus.
Morales s’est marié en février 2004 avec Rosa Maria Coreas, quelques jours seulement avant d’être emprisonné pour une agression, durant laquelle il a été blessé par balle. Rosa Maria était enceinte de sept mois.
Mais alors qu’il était en prison, il a assassiné un autre détenu, meurtre pour lequel il a été condamné à 35 années d’emprisonnement supplémentaires.
Il a affirmé que les autorités pénitentiaires l’avaient accusé à tort et qu’il n’avait pas assassiné ce codétenu. Il avait soi-disant quitté le monde des « maras » et ne faisait plus partie d’aucun gang… mais en 2007, il a rejoint un nouveau gang alors qu’il était détenu à la prison de San Francisco Gotera.
Il a plus que sûrement ordonné le meurtre de Rosa, son épouse et mère de ses deux jeunes fils, et du chef d’un gang avec qui elle l’aurait trompé. Le 31 août 2012, elle a été assassinée de deux balles dans la tête alors qu’elle tentait au contraire de s’éloigner du monde des gangs pour protéger ses enfants.
Le 2 septembre 2013, Gustavo Morales a été retrouvé poignardé à de multiples reprises dans sa cellule de la prison de San Miguel.
Trois autres détenus, des membres de son gang, ont avoué son meurtre.
Victimes
Au moins sept victimes.
Les noms, les détails et les descriptions ne sont malheureusement pas disponibles pour le moment.
Modus Operandi
Aucune information disponible pour le moment.
Motivations
Les procureurs n’ont pas le droit – selon la loi du Salvador – de discuter de l’affaire publiquement, mais deux d’entre eux ont parlé à l’agence ‘Associated Press’ à condition de rester anonymes.
Ils ont décrit un adolescent « obligé de devenir de plus en plus violent pour impressionner ses amis du gang. La brutalité l’a aidé à devenir l’un des chefs du gang ».
Le Salvador est le pays d’Amérique du Sud où la densité de population est la plus élevée, mais aussi le pays le plus industrialisé d’Amérique Centrale. Il subit beaucoup d’inégalités sociales et autant de séismes.
Dans les années 80, le Salvador a été ravagé par une Guerre Civile, résultat d’une énorme inégalité entre une élite minoritaire et opulente (qui dominait le gouvernement et l’économie) et la majorité de la population qui vivait (et continue de vivre) dans la plus grande misère, mais aussi entre l’extrême droite et la guérilla marxiste. La Guerre civile provoqua la mort de près de 100.000 personnes, ravagea le pays, et précipita d’importantes réformes politiques.
La Guerre Civile a pris fin officiellement en 1992.
En 1998, le Salvador a été de nouveau ravagé, par le cyclone Mitch, et en 2000 et 2001 par des tremblements de terre. 1200 personnes sont mortes et plus de 2 millions sont sans abris.
La pauvreté, la guerre civile, les catastrophes naturelles et les bouleversements qu’elles ont provoqués ont laissé leur marque sur la société salvadorienne, qui est déjà parmi les plus violentes d’Amérique du Sud.
Roberto Valencia, dans son livre consacré à Morales, explique que « C’était un meurtrier, mais aussi un être humain et, comme me l’a avoué Rosa (son épouse), un père magnifique. C’était peut-être la seule qualité de ‘El Directo’. Il avait toujours voulu des enfants, et pour ce coureur de jupons invétéré, machiste à l’extrême, la naissance de ses enfants était la chose la plus importante de sa vie.«
Mais Morales était aussi violemment, maladivement jaloux. Son épouse Rosa María avait peur de son mari, car il l’avait menacée de mort. Et elle a effectivement été assassinée.
Citations
« Cette affaire nous dit simplement à quel point les choses vont mal dans notre pays » : Armando Calderon Sol, Président du Salvador.
« Gustavo Adolfo est, d’une certaine manière, le douloureux visage de la société que nous avons créé » : Monseigneur Gregorio Rosa Chavez, Archevêque auxiliaire de San Salvador.
Bibliographie
« Carta desde Zacatraz: Retrato del monstruo de El Salvador«
Résumé : Pendant sept ans, le journaliste Roberto Valencia a interviewé une cinquantaine de personnes qui ont connu Gustavo Morales de près (proches, victimes, policiers, juges, prêtres, psychologues, membres de gangs…), a enquêté sur des documents officiels et des archives, et a passé quatre après-midi avec El Directo en Zacatraz, la prison de sécurité maximale. Avec ces informations, Valencia tisse une toile d’araignée détaillée qui relie, sans raccourcis ni tentations de disculpation, la violence des maras à l’histoire sociopolitique récente du Salvador ».
Liens
– Le Salvador : description de ce pays sur Wikipedia.
– Mara Salvatrucha, l’un des pires gangs « maras » (en anglais).
– Les maras sur wikipedia
– Derrière la violence des gangs du Salvador (Le Monde diplomatique)
– Les maras menacent l’ensemble du continent américain (CFRR)